En 2008,
l'animateur/producteur Arthur le disait presque partout dans ses interviews, il
avait envie d'avoir sa propre radio. Après avoir été intéressé par Rire &
Chansons puis Skyrock, c'est vers Ouï FM qu'il se tournera, radio qui
traversait à l’époque une période de turbulences.
Retour en arrière : en
septembre 2006, le CSA autorisait Ouï FM à devenir Virgin Radio. Une volonté du
groupe Virgin, puisque la radio rock parisienne appartenait à Richard Branson
depuis 1998. Le changement était prévu pour fin 2007, mais il ne se fera
finalement pas, Lagardère ayant réussi à arracher le droit d'exploitation de
la marque pour Europe 2 en juillet 2007. Ainsi, les grandes ambitions de Virgin
tombaient à l'eau, et le groupe britannique cherchait en conséquence à vendre
Ouï FM. Parmi les intéressés, des groupes régionaux comme Start (aujourd’hui
Groupe 1981) ou Contact, mais c'est finalement l'animateur/producteur Arthur qui
la reprendra. Une nouvelle qui avait fait beaucoup de bruit dans l'univers
radio.
L'info est confirmée
par Arthur lui-même quelques jours après, le 16 décembre 2008, lors d'une
interview vidéo dans le "Buzz média Orange - Le Figaro", où il donne quelques
infos sur ses projets. Il annonçait ainsi rendre à Ouï FM son esprit de liberté
rock, sans pour autant changer ses fondamentaux.
Les changements sont
apparus quelques semaines après, à l'aube de 2009, à commencer par l'habillage
antenne et le slogan : "Plus libre, plus rock !". Emmanuel Rials, bien
connu dans le monde de la radio, est nommé à sa tête. La grille a évoluée
ensuite petit à petit ; des animateurs sont partis (Christophe Crénel, Sandrine
Vandel...), d'autres sont arrivés (Princesse Jade (ancienne
complice d'Arthur à la radio), Julien Loeki (ex-Voltage et Fun Radio), Bob
(ex-Europe 1 Sport, Fun Radio et Skyrock), Sacha (qui était déjà dans la
maison)...). La rédaction de la radio, elle, est supprimée, pour laisser
davantage de place à la thématique rock.
SON -
Jingle qui annonce le "nouveau" Ouï FM (janvier 2009)
Arthur s'était fixé plusieurs objectifs : le premier, développer Ouï FM avec
les nouvelles technologies. Cela avait démarré à l’antenne avec un
partenariat avec Myspace, puis avec Deezer, pour lancer respectivement une
émission/concours ouverte à de jeunes groupes et artistes, et une émission ou
les auditeurs/internautes pouvaient faire leur propre playlist pendant une
heure. Des concepts qui marchent : "Ouï love Myspace", en 6 mois, avait reçu
environ 20 000 demandes de groupes/artistes, et "Ouï love Deezer" reçut une
tonne de playlists. De plus, pour ces 2 concepts originaux, Ouï FM avait reçu le
"prix de la meilleure initiative de diversification" lors du Grand Prix CB News
des Médias le 17 juin 2009.
Autre grande surprise,
le 18 juin 2009 à 20h, Maurice faisait son grand retour sur Ouï FM. Celui-ci
s'était fait connaître sur la radio rock entre 1991 et 1994 avant de rejoindre
Skyrock. Un retour aux sources donc, avec sa libre-antenne ou il s'accordait
toujours une carte blanche totale avec le ton qu’on lui connaît. Mais qui durera
qu'un an... Maurice reprendra ensuite du service sur sa propre webradio.
Autre objectif
d'Arthur :développer Ouï FM en national. Et c'est là que ça se complique
; Ouï FM n'avait pas profité des appels à candidatures du CSA lors du plan FM
qui avait démarré en 2006, censé réorganiser toute la FM nationale, tandis que
d'autres radios parisiennes qui développaient déjà leur réseau national en
avaient profité : Radio FG, Nova ou encore TSF Jazz. Ainsi, Ouï FM avait
obtenu quelques fréquences au fil des mois, non pas sans difficulté, car
elle peinait à arriver dans les grandes villes en FM. La radio misait donc
beaucoup sur le lancement de la radio numérique terrestre pour augmenter ses
chances d’avoir une présence nationale. Sauf qu’à la fin des années 2000, la RNT
était à la traine en France.
La station tentait
donc de trouver d'autres solutions, comme la reprise d'autres radios pour y
diffuser Ouï FM en syndication.
Arthur
tentera de racheter Parenthèse Radio en 2009, jeune réseau alors en grandes
difficultés, en vain. Il rachète ensuite Nice Radio, mais le CSA s'oppose à une
syndication avec le programme de Ouï FM. En mars 2011, Arthur rachète La
Radio de la Mer au groupe Contact, et cette fois-ci, la syndication est
validée : avec "La Radio de la Mer, programme Ouï FM", la radio rock avait gagné
une dizaine de fréquences en plus, tout en posant sa candidature aux fréquences
FM disponibles. Parmi les candidatures malheureuses, on peut noter celle de
Strasbourg ; Ouï FM avait obtenu une fréquence du CSA en 2012, mais qui n'a
jamais pu démarrer, la faute à certaines fréquences allemandes reçues dans la
ville. Skyrock et Le Mouv' sont aussi les candidats malheureux de ce lancement
raté. Ouï FM et Skyrock obtiendront gain de cause 5 ans plus tard.
Le Mouv', justement,
était dans le viseur de Ouï FM à la rentrée 2013, moment ou Joël Ronez venait
d'être nommé directeur de la radio jeune de Radio France, prêt à attaquer la
construction d'une nouvelle grille mise en place en janvier 2014. Ouï FM
annonçait dans un communiqué qu'elle voulait proposer une fusion avec Le Mouv', estimant
cette dernière en perte de vitesse tandis que la première est en plein
développement, tout en dénonçant le processus d'attribution des fréquences par
le CSA aux radios publiques qui "ont systématiquement la priorité sur les
radios privées". Cette proposition d'union des forces a été pointée du doigt par
certains, notamment à Radio France. Jean-Luc Hees, alors président de Radio
France, y a donné un refus formel : "Il faudra me
passer sur le corps (...) On ne confie pas les clés de la Banque de France à
Bonnie & Clyde". Si depuis, il n'y a pas eu
de suite, cette affaire aura profité à Ouï FM en faisant parler d'elle.
Au cours des années
2010, Ouï FM avait poursuivi son développement sans négliger le web, ou se
jouait une grande partie de son audience au-delà de Paris. Elle y développait un
bouquet de webradios rock plus ciblées, et une web-tv filmant les émissions en
direct dans les studios.
La grille, elle, jouait la carte de la stabilité tout
en misant sur des émissions qui renforçaient l'ADN rock et le ton décalé de la
station ;
quelques historiques comme Dom Kiris, Josquin ou Thomas Caussé cohabitaient avec une nouvelle
génération de jeunes animateurs férus de rock (Sacha, Caroline Chimot, Joe Hume, Marjorie Hache,
Marie…). A la rentrée 2012, Arnold y faisait son grand retour en radio après des
années d'absence, et s'occupait de réveiller les auditeurs.
(crédit photo : Yann Buisson)
En mars 2012, le spécialiste du rock Philippe Manoeuvre y fait son arrivée
avec une émission majoritairement classic rock et vinyles où il a carte blanche.
Une
arrivée légitime pour la radio rock, pour laquelle il prêta sa voix pour une pub
en 2014. Ouï FM tentera aussi
quelques « one-shots » en faisant revenir de grandes voix de la FM, comme Max
qui relancer son « Starsystem » pendant un mois en mai 2015, et Arthur lui-même
qui reprendra le micro en juin 2016 pour 2 mois de matinale baptisée « Radio
Jack », accompagné des humoristes sociétaires de ses émissions de TF1.
La radio numérique se
lance officiellement en 2014, avec un développement progressif. Ouï FM est
évidemment de la partie et postule partout où le DAB+ prévoit de s’installer. Le
groupe d'Arthur en a profité pour y lancer également d'autres projets : Ouï Collector, une radio musicale dédiée aux légendes musicales (rebaptisée par la
suite Collector Radio), et Radio Life, avec une programmation « feel good » qui
mélange musique des années 2000 et sketchs.
Mais à la rentrée
2017, l’antenne de Ouï FM réduit la voilure ; quasiment toutes les émissions
sont supprimées, et de nombreux animateurs s’en vont. La grille, devenue très
minimaliste, se veut essentiellement musicale, peut-être pour des raisons
économiques. La radio sera mise en vente début 2019, et cédée au Groupe 1981 fin
avril, après que Oui FM ait pu redresser ses audiences. Arthur dira à ce sujet :
« Ceux qui écrivent que je « jette l'éponge » me connaissent bien mal... On ne
jette pas l'éponge lorsque l'on vend une radio en pleine forme. J'ai donc tenu
la promesse que j'ai faite en achetant OUI FM à Sir Richard Branson en 2009 :
réveiller la belle endormie, développer ses implantations et approcher le plus
près possible 1% d'audience nationale. Chose faite ! »
Le Groupe 1981 ne
change pas la formule de Ouï FM ; la couleur rock reste de mise, la grille reste
très musicale avec peu d’émissions et agrémentée de chroniques, et quelques
synergies se mettent en place avec les autres radios du groupe. Une page sera
totalement tournée en mars 2021 avec le départ de Ouï FM de ses locaux de
Bastille qu’elle aura occupé durant 3 décennies pour déménager dans le nouveau
siège du groupe à Issy-les-Moulineaux aux côtés de Voltage, Ado et Latina.
Les anciens locaux de Ouï FM à Bastille (photo personnelle)
Aujourd'hui,
Ouï FM est bien installée dans une grande partie de la France grâce au DAB+.
Mais bien que l’esprit de la radio ne soit plus vraiment le même qu’il y a 15
ans, la radio est assurée d’écrire de nouvelles pages de son avenir…