L’information est
un des principaux domaines que l’on retrouve à la radio. Domaine renforcé depuis
la fin des années 80 avec la création de France Info, une pionnière qui fera
très vite des émules des années plus tard chez RTL, Europe 1 ou RMC qui
s’étaient lancés dans la bataille de l’info, surtout le matin et en fin de
journée. Puis arriva BFM en 1992 avec un public plus spécifique : celui du
monde des affaires et de l’entreprise. Une jeune radio indépendante qui
avait grandi progressivement, connu des secousses au début des années 2000, pour
être enfin reprise par NextRadio TV pour trouver un nouveau souffle. A
l’époque, qui aurait pu imaginer que cette radio, nommé aujourd'hui BFM Business
deviendrait dans un avenir proche une chaîne de télévision ?
1- DE BFM A BFM BUSINESS, LA COMBINAISON RADIO/TV
Le
groupe d’Alain Weill, qui avait racheté la radio en 2003, 2 ans après la relance
de RMC, avait capitalisé sur la marque BFM pour développer une marque média
d’information. La première pierre en fût BFM TV, lancée sur la TNT en
novembre 2005, damant le pion à TF1 qui avait préféré à l’époque miser sur
la TNT payante avec LCI. Des débuts plutôt modestes, qui évolueront avec
davantage de moyens et une audience progressive qui feront de BFM TV la
principale chaîne d’information de France. Mais son contenu et sa thématique
sont bien en décalage avec BFM, la radio, qui continuait son chemin avec sa
thématique autour de l’économie. Ce qui devait être d’ailleurs une
thématique principale de BFM TV lors de son audition auprès du CSA lors de sa
candidature pour la TNT. C’était d’ailleurs pour se distinguer de sa sœur
télé, qui gagnait plus en notoriété, que BFM (la radio) sera rebaptisée en 2009…
BFM Radio ! Un nom qui fait un peu confusion, et qui sera vite résolu…
Fin 2010, au
moment des 10 ans du groupe et des 5 ans de BFM TV, NextRadio TV décidait de
donner un nouvel élan à BFM Radio en la renommant à nouveau avec un nom plus
clair : BFM Business. Mais plus qu’un nouveau nom : la radio devient une
télévision ! BFM Business, lancée le 15 novembre 2010, allait combler un
vide dans le PAF qui n’avait plus de chaîne d’information économique depuis la
fermeture de la version française de Bloomberg en mars 2009 (dans laquelle BFM,
pour anecdote, était partenaire dans les années 90). Le rachat par NextRadio TV
de la chaîne locale Cap 24 en Île-de-France avait permis à BFM Business
d’émettre sur la TNT parisienne dès sa création, diffusion qui durera jusqu’en
2016 pour poursuivre ensuite seulement sur les box et le satellite.
Avec
un studio entièrement neuf et moderne, BFM Business mettait en images le son de
la radio, ce qui n’était pas une première en France, Fun Radio l’ayant déjà fait
en 1997 avec Fun TV durant un an et demi. Mais dans sa thématique, BFM
Business était une pionnière, que Bloomberg et CNBC avaient scruté dès sa
naissance, selon Alain Weill qui revendiquait une chaîne qui n’est « pas
low-cost, mais high-tech ! ». Depuis, BFM Business s’est faite sa place dans
le paysage des chaînes thématiques, tout comme en radio. Mais avec une
impression que la télévision a fini par engloutir un peu la radio. On peut le
constater notamment lorsqu’il s’agit de montrer des graphiques ou images à
l’écran, et qu’il arrive que le présentateur oublie les auditeurs en
« montrant ces images que vous voyez à l’écran »… D’autant que l’équipe
avait eu une formation pour s’adapter aux codes de la télévision, notamment sur
les codes vestimentaires, les gesticulations… A ce stade, est-ce toujours de
la radio ?
(crédit photo : Radioscope.fr)
2 - FRANCE INFO, RADIO DEVENUE MARQUE MULTI-SUPPORTS DE L'INFO DU SERVICE PUBLIC
Dans un autre
style, il y a France Info, qui, depuis 2016, n’est plus qu’une marque de radio.
France Télévisions avait en tête le projet d’une chaîne info depuis longtemps ;
au début des années 2000, lorsque la TNT était encore au stade de chantier, la
télévision publique en avait fait un de ses projets prioritaires. Mais le
changement de gouvernement en 2002 rebat les cartes, et le nouveau Premier
ministre, Jean-Pierre-Raffarin, avait décidé de faire des coupes budgétaires,
obligeant France Télévisions à renoncer à sa chaîne info. Le projet
ressurgira en 2015 après la nomination de Delphine Ernotte à la tête de France
Télévisions, sans susciter l’enthousiasme d’une partie des journalistes.
Le
projet prendra très vite forme et marquera la surprise en annonçant qu’elle
prendra le nom de France Info. Il ne s’agit pas de faire une version filmée
de la radio (qui, d’ailleurs, existait déjà sur le site internet de la radio à
partir de 2015), mais une chaîne bien à part, pilotée par France Télévisions,
en association avec Radio France, l’INA et France 24, qui apportent chacun
de leurs contenus à la chaîne. Un projet de grande envergure censé faire de
France Info la marque globale de l’information du service public. Elle sera
lancée sur le canal 27 de la TNT le 1er septembre 2016 à 20h,
avec un nouvel habillage sonore signé Jean-Michel Jarre qui habille aussi la
radio (qui l’avait mis en place une semaine plus tôt sur son antenne). Et une
écriture différente de la marque : « franceinfo : » et un logo uniforme qui
donne l’avantage à la typographie de France TV, au détriment de Radio France
dont l’emblématique « poêle à frire » disparaît du logo pour la première fois
sur une de ses radios…
(image du décompte de Franceinfo (TV) avant le lancement, le 01/09/2016)
La radio
proposait pour la télévision le rappel des titres toutes les 10 minutes, ainsi
que quelques rendez-vous phares comme « Les informés » et l’interview politique
de 8h30. Le rendez-vous politique du dimanche midi de France Inter est également
diffusé. Mais cette nouveauté « hybride » avait du mal à passer côté radio ;
la confusion entre France Info (la radio) et France Info (la télé) était
récurrente, et les salariés de la radio craignaient une dégradation de
l’antenne au profit de la télévision. Le 15 décembre 2016, trois mois après le
lancement, les salariés de la radio s’étaient mis en grève pour réclamer le
« maintien de programmes radio dignes de ce nom » et « le respect de la
législation sur les rythmes de travail ».
Depuis, les deux
médias fonctionnent indépendamment tout en proposant des rendez-vous communs.
Mais on peut se demander si de nouvelles synergies ne vont pas se mettre en
place dans le futur pour la marque, en sachant que France Info (TV) a des
audiences à la peine face à ses concurrentes BFM TV, CNews et LCI ; Alexis
Delahousse a été recruté par la présidente de Radio France, Sibyle Veil, en
septembre 2024 pour réfléchir à de nouvelles associations entre la radio et la
télévision publique.
3
- DANS LE SENS INVERSE, QUAND LES CHAÎNES INFOS VOULAIENT S'ESSAYER A LA RADIO...
Quant à BFM
Business, elle avait fait des émules dans son groupe ; l’arrivée du DAB+ a
donné l’idée de décliner BFM TV en radio sur le même modèle, dans le sens
inverse, et avec quelques décrochages et contenus exclusivement
radiophoniques : BFM Radio est ainsi née en octobre 2021, en reprenant
un ancien nom de BFM Business. Ce qui peut prêter à des confusions, lorsqu’il
s’agit de refaire l’histoire de la marque BFM… Reste à voir dans le futur si BFM
Radio fera concurrence à France Info qui est restée la dominante dans la
thématique des radios d'information en continu, voire même en monopole.
Des jeunes concurrentes, France Info
aurait pu en avoir. BFM, en 2000, avait tenté une nouvelle formule autour
d'une information plus généraliste qu'économique pour essayer de
concurrencer la radio publique, mais qui n'avait pas fait long feu. Quelques
années plus tard, TF1 avait tenté l'aventure radio en donnant naissance à LCI
Radio en 2009, destinée à une radio numérique qui tardait à arriver, et qui
avait fermé 2 ans plus tard. Autre chaîne info à avoir tenté de se lancer dans
la radio : Euronews. La chaîne européenne qui était basée à Lyon avait lancé
Euronews Radio en 2012 sur internet, et sur le DAB+ en 2014 dès son démarrage.
Mais l'aventure n'avait pas duré non plus, la radio avait du renoncer à son
autorisation d'émettre suite à sa reprise par un actionnaire majoritaire
non-européen (la loi stipulant que le capital d'un média hertzien ne doit pas
appartenir à plus de 20% à des capitaux non-européens). On peut citer aussi
I>Télé qui s'était associée avec Goom Radio pour lancer sa propre radio sur
internet, qui reprenait essentiellement le son de la chaîne avec quelques
contenus produits chez Goom, et qui eut une courte durée de vie elle aussi.
Aujourd'hui, on assiste au même scénario avec sa successeuse, CNews, dont on
retrouve plusieurs émissions phares retransmises sur Europe 1. Symbole d'une
synergie lancée entre les 2 médias rapprochés par Vivendi et Lagardère.
Beaucoup de chaînes de télévisions,
donc, qui avaient essayé de se lancer dans la radio, sans qu'il n'y ait jamais
eu réellement de nouveaux projets exclusivement radio dans l'information. Mais
les véritables concurrentes de France Info, aujourd'hui, ne sont-elles pas à
voir du côté des radios généralistes qui surfent beaucoup sur les émissions de
débats et d'analyses, voire même chez les chaînes infos de la TNT, et les
réseaux sociaux où tout est instantané ? D'autant que RTL, Europe 1, France
Inter, RMC et Sud Radio se sont mises depuis elles aussi à l'image dans leurs
tranches infos, surtout pour les interviews politiques matinales, dont les
propos peuvent alimenter les JT...